She brings you chocolate chips to eat {Oxilly}

De base, t'as pas compris ce que tu foutais là. T’étais posé tranquilou aux dortoirs, à bouffer tes chips en lisant Batman. Puis ton vieux Iphone3 s’est mis à vibrer comme un fou. “Ox, go musée, y’a une expo que je veux trop voir, bouge ton cul tout plat d’asiat”. Le moins qu’on puisse dire, c’est que quand Sun avait une envie, elle manquait cruellement de tact. Mais c’était ton trésor, ton soleil, tu savais pas dire non, alors t’as bougé ton cul d’asiat bien ferme -parce que fallait pas déconner, il était cool, ton cul- et tu t’es posé sur les marches du musée, comme si t’étais Blair Waldorf dans Gossip Girl. Puis t’as attendu. D’abord, y’avait des mecs tirés à quatre épingles qui s’pointaient, comme s’ils allaient boire du vin rouge et manger du fromage qui pue devant des tableaux qui valaient la peau du cul de Michael Jackson. Ils te regardaient comme si t’étais un clochard, t’as même crut qu’ils allaient te donner des pièces à un moment. Mais t’as pas trop fait attention et t’as continué de manger tes chips. Y’a eut ces filles avec des culs d’enfer qui sont passées à côté de toi pour s’asseoir plus loin. T’as quoi avec les culs, aujourd’hui, Oxy ? C’était peut être parce que t’avais pas baisé depuis un moment. Ouais, faudrait que tu t’vides les couilles à un moment. T’avais un pote au lycée qui disait que tu pouvais chopper le cancer des boules comme ça. Askip. Tu continues de manger tes chips. Une heure passe, Sun est toujours pas là. Ca t’étonnes pas. Mais tu pardonnes parce que tu pardonnes tout à cette gamine. T’es tellement une victime devant elle que t’aurais pas dut naître le premier c’est sûre. Par contre, dès qu’un mec, une meuf, quelqu’un avec un air louche s’approche, tu passes en mode Dark Ox et personne aime Dark Ox. Déjà parce que c’est méga moche comme nom. Et ensuite, parce que tu te prends trop la tête et ça te donne faim. Tu continues de manger tes chips. Y’a des vieux qui sortent du musée, en mode ultra intéressés. Tu te demandes à quoi tu ressembleras quand tu seras courbé et tout ridé. Tu passeras ton temps dans un fauteuil, à regarder des chiffres et des lettres, à bouffer de la purée de carottes froide. Le mieux, ce serait de le faire dans une petite baraque au milieu de nulle part dans un pays paumé. Ouais, le pied. Tu souris à cette pensée. Les vieux, ils ont la belle vie. Bon, à part les problèmes d’articulations, la mort qui pend au nez, toutes ces merdes, c’est chill, non ? Puis, t’façon, t’as déjà Alzheimer alors ça va pas beaucoup te changer. Deux heures sont passées. T’aperçois une blonde. T’as l’impression de la connaître. Elle s’approche et toi, tu comprends pas tout de suite. Ah. C’est pas Ophélia, ça ? -Non, c’est pas elle, Oxy- Ouais, c’est elle, t’es sûre de toi. Bouffon, va. “Salut, Ophélia.”. Ton portable joue les vibro dans ta poche. “Dsl frangin, jpeux pas vnir mais jtm qd même hihi”. Pourquoi elle rajoute “Hihi” à la fin de son message ? C’est pas comme si tu pouvais entendre son rire. Bah du coup, maintenant, si. Putain. T’avais envie de mater Gossip Girl maintenant.

Y a une espèce de fantasme autour des musées, entre silence et démence, une ligne fine, les gens aiment bien se poster devant des toiles qu’ont eu lourde signification pour leur créateur mais pour eux c’est qu’une raison de plus pour sortir avec leur deuxième partie, ils se tiennent la main, ils disent rien. Sûrement un des deux qui pense à se taper la Vénus de Milo, l’autre qu’a envie d’un Burger King mais qui va prendre le supplément salade pour s’amadouer. Et dans le tableau social Billy est de ces gamines se trimballant à droite à gauche dans l’espoir de trouver quelques lignes à ajouter à un devoir. - Dans son cas elle a jeté les équations d’un côté pour se mettre à balbutier des affabulations à propos de pourquoi et comment ceux qui s’aiment se tiennent la main, elle a un ruban dans les cheveux, rouge pour Goddard, évidemment. Billy passe beaucoup trop de temps à essayer de déchiffrer les comportements humains et pas assez à se remettre en question. Là tout de suite elle devrait être au courant que son obsession pour la romance est dépassée, d’abord parce qu’elle a failli mourir pour une pinte de bière avant d’embrasser Felix Glendower, ensuite parce qu’Oxlene Park est posté devant elle en train de dévisager la foule, la bouche couverte de poudre de doritos et dans une position à la dessine-moi comme une des tes françaises Jack. Mais elle garde son sourire révoltant, son air à la Sandra Dee, sa belle petite démarche de fille docile, les deux mains plaquées sur son cahier d’où les feuilles menacent de s’envoler à tout moment. Et à cet instant rien ne prédit toute la détresse qui se prépare à Brown, entre les déboires des Chapin, les désinvoltures des Sears, la rancune des Damin et un mélange des trois pour les Goddard. Quand Jane Osborn n’ouvre pas la bouche au fond elle peut adoucir l’atmosphère quelques minutes, mais rien n’empêche quelques averses après une éclaircie. « Salut Ox. Au fait c’est Billy, Ophélia t’aurait sûrement démonté la mâchoire si j’avais été… elle. » Elle s’assied sur les marches, se fige quelques secondes parce qu’elle remarque toutes les feuilles éparpillées à droite à gauche, se précipite pour pas se les faire prendre par le vent cruel qu’à l’air de rôder dans le quartier.

You know you Love Me. X(ox)O. Gossip Guuuurl. Alors que tu te retapais le générique de Gossip Girl dans la tête, Billy s’installe. Elle dit des trucs, ton oreille prends les info’ mais ton cerveau la fait patienter. Dan était quand même un sacré con, mais on le kiffait. Tu t’imagines en Gosisp Girl ? Grave ! Ouais nan, ça a l’air chiant à tenir, ce genre de blog. “Ah. Ok. Ca explique des trucs, ouais.”. Vu comment l’autre Billy t’avait mal regardé quand tu l’avais salué à la bibli’, t’avais sûrement dû te tromper, encore. Sauf que tu trouvais Billy cool. Ouais, elle s’en fichait si t’oubliais son prénom, elle s’énervait pas contre toi. Tu soupires. “En même temps, vous êtes toutes blondes, j’comprends pas.”. Ouais, avec Billy, tu pouvais aligner plus de deux mots. En même temps, tu te sentais plus à l’aise, c’était un avantage. Même si t’as toujours le visage inexpressif, la mine désintéressé, le regard détaché, t’aimais bien, quand Billy se posait avec toi. Puis parfois, elle t’expliquait des trucs sur les filles. Genre, que c’était pas super ouf de demander son prénom à une fille qui te roulait des pelles depuis deux semaines. Tu continue de manger tes chips alors que Billy ramasse ses feuilles. “Sun m’a encore lâché au dernier moment. Du coup, je sais pas quoi faire.”. Tes yeux regardent Billy de haut en bas. C’est peut être parce que t’étais en manque mais tu regardais beaucoup les meufs, aujourd’hui. Du coup, son cul y passe aussi et fallait dire que celui de sa soeur était mieux. Ouais, tu t’tâtais encore un peu. Bref, t’y passes pas plus de deux secondes, les chips, c’est plus intéressant. T’aimais bien celles au paprika, après ça piquait sur ta langue et c’était une sensation cool. Merde, Ox. C’est la dernière. Courage. Choji dans Naruto, il arrête pas de dire que la dernière chips, c’est la meilleur. Savoure la, mon vieux. Savoure, putain. Tu croques dedans comme si c’était du caviar en tuile, puis finalement, le plaisir est de courte durée. Bordel. T’as pas l’impression d’avoir joui ? Ouais, un peu. Tu t’essuies vite fait la bouche avec ta manche et tu regardes de nouveau Billy. “Dis Betty, les meufs aussi elles ont les ovaires qui explosent quand elles baisent pas pendant longtemps ?”. Alors déjà, t’y étais presque mais c’est pas encore ça, le prénom. Merde, Ox, elle vient de le dire ! Et ouais, non, Ox, faut pas demander ça. Non mais sérieux, t’as quel âge ? T’es désespérant, parfois. Tu sais même pas comment Billy elle peut te supporter, sérieux. Peut être parce que tu fais un peu pitié, aussi. Puis, t’es pas méchant, au fond. Juste un peu con. Puis, tu peux pas poser ce genre de questions à Sun, c’est creepy, même pour toi. T’es pas proche de beaucoup de meufs, ou même de gens en général, alors Billy, c’est le bon choix. Puis, c’était une meuf, elle devait savoir ce genre de truc, non ? Quoi que, elle aussi, elle était du genre paumée de la vie. Enfin, surtout dans les relations avec les gens, comme toi au final. T’façon, dans Gossip Girl, tout le monde baise avec tout le monde et ça fait trente six saisons, c’est que c’est chaud à comprendre, comme concept.

Billy c’était même pas son vrai nom. Mais Billy ça lui allait bien alors c’était pas grave si ça roulait en dehors de la bouche des gens parce que ça leur donnait un certain charme, Billy elle aimait bien. Les feuilles entre les doigts, la blonde titube pour se planter à côté d’Oxlene, il a l’air ailleurs, dans un de ces mondes que Billy sait pas encore dessiner. Elle l’écoute, le papier se froisse entre ses mains, elle les range soigneusement l’une après l’autre. Quand il parle de Sun, Billy imagine un soleil, elle se dit que c’est beau d’avoir un gosse qui porte un nom plein de sens, et que toutes les planètes sont pas suffisantes pour la décrire, c’est pas très important si Oxlene ajoute pas plus de mots à sa phrase, en un sens, ça veut juste dire qu’il aurait bien aimé qu’elle soit là. « Hmm peut être que pour te faciliter les choses, je teindrai mes cheveux un jour, mais ils sont bien mes cheveux alors à la place, tu devrais noter le prénom des gens quelque part… T’sais en général quand on échange nos numéros, on peut directement mettre une image sur un nom… » Billy lui montre son répertoire, et la photo un peu floue qu’elle a prise d’Oxlene quelques semaines avant. « J’sais pas, tu veux entrer et commenter des tableaux comme un vieux snob aigri que t’as pas envie de commenter comme un vieux snob aigri mais le faire quand même? » Elle aimait bien les musées, c’était pas ça le problème, sauf qu’elle préférait leurs façades et les gens qu’elle rencontrait sur les marches, parce que dans les histoires, les gamins accompagnent leurs parents derrière les grandes toiles, et même s’ils comprennent pas tout, ils ont l’étincelle qui dépeint sur tout leur visage, quitte à les faire sourire, et c’est un de ces rêves qui s’est pas réalisé, avec les années. Maintenant Billy elle a l’âge où on lui demande si elle est frustrée de pas se faire bouleverser par quelqu’un, on lui demande si ça va de vivre sans les bouches qui s’écrasent sur la sienne juste pour la secouer, on lui demande comment elle fait. « Techniquement l’organe érogène de la femme… c’est le clitoris mais. Je sais pas. » Elle lui sourit doucement, regarde ailleurs, le groupe de filles à côté détourne la tête en synchronie. Billy se retient de rire, d'ailleurs, c’est pas qu’elle a rien à dire, c’est qu’elle tient pas vraiment à le dire.

Ouais, ce concept des photos sur les contacts, t’en avais entendu parler. T’avais même testé. Enfin, t’avais fait ton Ox, quoi. Tu sors le portable et montre le contact qui est censé désigner Billy : Une photo de Starfire avec comme nom de contact “Koriand'r” au lieu de Billy. Et pour tous tes contacts, excepté Sun qui avait son prénom et sa jolie photo souvenir, y’avait une photo de personnages de comics avec leurs vraies identités en nom. Tu hausses simplement les épaules. “Quand j’arrive pas à me souvenir du prénom, ou de l’orthographe, je fais ça. C’est plus sympa.”. Pour son dealer, il avait mit Pietro Maximoff parce qu’il était sacrément rapide, comme gars. Enfin, par rapport à toi, c’est sûre. Même si t’aimais Team DC, les X-Men, c’était quand même vachement cool. Bon, Spiderman aussi, fallait l’avouer. Mais sinon, Avengers, Deadpool, tout ça, c’était pas ta cam. Tu détestais pas mais t’étais vraiment pas un fan. #DC4Ever. Puis franchement, les meufs de DC, elles étaient tellement badass et bonnes. Catwoman ? Poison Ivy ? Black Canary ? Flash ? Ouais bon, c’était pas une meuf mais quelque part, tu le trouvais sexy aussi. Puis, Batman, putain de sex-symbole, aussi. Peut être que dans un monde parallèle, t’étais aussi un Bruce Wayne ? Le genre de mec ultra charismatique qui serre toutes les meufs qu’il veut et super baraqué et tout. Le musée, ça te rappelle la scène d’ouverture de Justice League où Diana Prince reçoit le colis de Bruce Wayne et- Quoi ? On te parle ? Allons, Ox, c’est Billy, un petit effort. Elle veut jouer des rôles. Malgré toi, tu t’mets à sourire un peu, comme un gamin. “Ca te dit, je joue Bruce Wayne et toi Diana Prince ? J’veux trop jouer le mec pété d’thunes. Ouais, enfin, le mec pété d’thunes qui sauve secrètement le monde, quoi.”. Ouais parce que, c’est pas comme si t’étais genre “pauvre”. T’es pas ultra friqué non plus mais franchement, t’as de la marge. Puis avec les gros chèques des grands-parents, t’es pas en danger financièrement, loin de là. Et c’est bon, c’est reparti, t’es déjà dans tes fantasmes, tu t’imagines déjà baiser Sélina Kyle dans un placard et te faire lacéré le dos par ses griffes de chatte en chaleur. Ouais, franchement, Ox, faut t’trouver quelqu’un parce que ça devient grave. Ca parle de clito ou t’es encore en train de rêver ? “Hein ? Ah. Ouais, ok. Pas grave.”. Tu bouges ton cul des marches, tu captes pas vraiment les meufs qui gloussent, t’façon, t’aurais pas compris pourquoi elles se marrent et tu t’en fous. T’attrapes Billy par la manche et tu la tires vers l’entrée. Ouais, t’as l’air déter. Et pourtant, t’as rien fumer. Comme quoi, dès que Batsy venait mettre son grain de sel, d’un coup, tu t’sentais pousser des ailes de chauves-souris.

« Koriand’r ? » Billy se penche, elle voit que sous son numéro y a une femme, typée afro-alien quelque chose, les cheveux-flamme, les yeux-lasers, elle connait pas ce personnage, ça l’intrigue, elle lui dit que c’est drôle, qu’elle aime bien et qu’il devrait pas trop s’en faire si pour lui c’est plus facile comme ça. « C’est juste que, y a des gens qui se disent que quand tu connais pas leur prénom tu veux pas avoir affaire à eux. » La blonde hausse les épaules, elle aime bien observer les autres de loin aussi, elle se retrouve pas spécialement dans les bandes, et en ce moment elle est en train de créer une tempête chez les Chapin alors elle a rien à dire, d’un point de vue social c’est pas un modèle, la Osborn. « La première fois que j’ai embrassé quelqu’un je connaissais pas son nom, d’ailleurs je le connais toujours pas, c’était dans un placard pour sept minutes au paradis et ça m’a plus fait penser à sept minutes avec un gars qui pleure parce qu’il a peur des microbes sur ta bouche. » Elle fixe le sol cinq secondes, elle aime pas spécialement repenser à son premier baiser.

Elle se retrouve près de l’entrée, elle regarde Oxlene qu’a l’air de jeter un oeil partout, elle se demande comment elle a réussi à activer la machine entre sa cage thoracique et le reste de ses organes, mais dans tous les cas il a fini par se mettre à exister, faisant taire toutes les rumeurs qui traînent sur lui à la maison, entre les théories sur le cadavre anime, le vieux con dans un corps de jeune et le beau mec mystérieux avec des cheveux noir corbeau. « T’es sûr, tu veux pas attendre un jour où Sun sera dispo?- Oh, hm, deux entrées s’il vous plait. Oui, étudiants. Ouioui. »

Pour les Osborn l’argent pousse à l’intérieur des poches, Billy étale un billet de vingt sous le nez de l’employé de musée, ils se retrouvent à l’intérieur, le plafond a l’air de décoller un peu trop haut. Elle se dit que dans la plupart de ses bouquins, c’est l’endroit idéal pour un premier rendez-vous. Mais son premier rendez-vous c’était dans un pub alors elle a comme un doute.

Starfire, tu la trouvais tellement mignonne quand t’étais ado. Un peu chiante, un peu conne mais attachante et finalement, pas si débile que ça, quand t’y penses. Un peu comme Billy, ouais. Au début, tu faisais pas vraiment attention à elle. Mais finalement, elle est restée près de toi, elle a fait attention et du coup, tu lui as donné le nom d’un de tes perso’ préférés. C’était peut être pas celle à laquelle tu pensais tout le temps mais au moins, tu pensais à elle. Puis elle te parle encore, elle te parle de son premier baiser. Tu trouvais même qu’elle parlait un peu beaucoup mais c’était pas grave si c’était Billy. Elle se souvient pas du nom de son premier baiser. Et toi ? T’as des souvenirs Ox ? Ou tu te caches en disant que tu sais plus ? Fais pas semblant, Ox. T’oublies un tas de choses, mais ton premier baiser, c’est le seul moment où t’as eut l’impression de pas en avoir quelque chose à foutre des meufs. C’est vrai, ça t’arrive de zapper ce “détails”. Mais là, tout de suite, t’as l’image bien nette dans ta tête de ses lèvres contre les tiennes. De sa joue chaude. Ses cheveux. Ses yeux qui brillent. Son parfum. Parfois, t’as des flash comme ça qui reviennent. Puis t’oublies de nouveau. Tant pis. Tu sais pas pourquoi Billy parle de ça mais tu dis rien. T’as rien à dire, t’façon. Puis, jouer les Bruce Wayne, c’était plus amusant que juste être Oxlene. T’arranges tes cheveux, tu bombes le torse, tu fais ton regard perçant. T’es Bruce, maintenant. Tes mains se rejoignent dans ton dos, tu marches comme si ton vieux pull délabré était un putain de costume à 100000$ et tu t’avances dans les allées en toisant les gens du regard. Ouais, défoncé ou pas, tu restais le meilleur imitateur de Batman de tous les temps. Tu t’poses devant une peinture, tu la regardes à peine. Puis, avec une voix grave, un air détaché, t’adresses un petit sourire à Billy. “C’est un faux. Le vrai a été vendu en 98 au marché noir. Maintenant …”. Ta gorge vibre, t’espères que Jane comprendra la référence. Mais tu t’attends pas à grand chose non plus. Puis, vu la putain de tension sexuelle qu’il y a entre Diana et Bruce, t’arrives pas à imaginer avoir la même chose avec la blonde. Alors tu fais ce que Bruce aurait fait, tu mates d’autres filles avec un air ténébreux, un demi sourire et les mains dans les poches comme si t’étais le mec le plus sexy du monde entier. Ox, si seulement tu pouvais jouer un rôle tous les jours. Mais tu peux pas. Puis, ça t’intéresse pas d’être Bruce Wayne toute ta vie. T’as même pas de Batcave. Pire, t’as pas d’Alfred. Sauf si Sun est prête à jouer Alfred. Et encore, ça serait un Alfred assez spécial mais au moins, ce serait ton Alfred féminin et asiatique perso’. Bon, elles étaient où les coupes de champagnes, dans tout ça ?

Les musées ça a toujours rendu Billy nerveuse. Elle aimait pas les grands silences, d’abord parce qu’elle était pas bonne à ce jeu ensuite parce que c’était bizarre de voir des gens aller et venir sans un mot, mais c’était quand elle était petite, maintenant, elle aime bien détourner les yeux, cinq secondes parce qu’ils ont l’air de se souvenir de quelque chose d’important quand ils voient une boîte de conserve enfermée entre cinq plaques de verre renforcé. Et ça c’est franchement drôle. 

Les deux enfants de Goddard s’aventure dans les galeries, la tête de Billy dépasse de derrière l’épaule d’Oxlene, elle a rarement dépassé la première salle. La voix d’Oxlene est un mélange entre Batman et Superman, mais à l’entendre c’est définitivement Bruce Wayne, d’ailleurs, elle était pas supposée jouer Diana? Dommage, elle connaît que Robin. « Eh le vioc on fait quoi ici? » Elle l’a murmuré parce qu’elle a pas encore la mécanique tout à fait rodée, un vieux tourne la tête vers elle, Billy fait un large sourire qui menace de manger le reste de son visage. « C’est bizarre d’vous voir en jogging Bruce. »

Billy lève les yeux elle est pas certaine de bien s’y prendre mais elle s’éclaircit la voix. « Vous allez vraiment accrocher une meuf à poil dans votre salon? C’est pas un peu cliché? » En vrai Billy s’était arrêtée pour regarder la toile, elle avait eu besoin de quelques secondes pour reprendre les mimiques désinvoltes de son personnage. Elle reprend sa voix pour se pencher vers Oxlene, « Et Sun, pourquoi elle pouvait pas venir? Je la voix pas souvent. »

Toi, t’étais à fond dans ton rôle. T’étais Bruce jusqu’au bout des ongles et Billy … avait décidé de changer de film. Elle passait en mode Robin. C’est vrai qu’il fut un temps très court où Robin était une fille. Eh bien, pourquoi pas. Tu t’laisses pas perturber, t’es le mec le plus friqué de cette ville, tu serres qui tu veux, t’as un majordome ultra stylé. Bref. T’es Bruce Wayne. Tu gardes les épaules droites, le visage impassible. Tes yeux toisent presque Billy du regard et, après sa série de questions, tu pousses un soupire. “C’est pour ça que Superman bosse seul.”. Ouais, bon, tu venais de citer le pire Batman du monde entier mais fallait dire que c’était un nanar ultra connu. Le navet d’or quoi. T’façon, Bruce, en survet’ ou en tenue de ballerine, il déchire tout avec son cul d’enfer. “Gamin, j’suis riche et aucune femme ne peut me résister. Autant pousser le cliché jusqu’au bout.”. Les personnes âgés passent près d’eux, le regard réprobateur. Tu y réponds par un sourire suffisant. De toutes façon, qu’est-ce qu’ils allaient te faire ces petits vieux ? Que dalle. En même temps, Batman, quand il était vieux, il était aussi sacrément classe. Le genre de petit papi avec le dos en miette qui balance sa canne en cirant “C’est comme ça que tu comptes devenir Batman, pd ???”. Peut être que toi aussi tu seras le genre de vieux véner H24, qui hurle des insultes homophobes au premier péteux qui vient te faire chier pour te voler ton héritage. Tu sais pas encore. Pour le moment, t’as juste l’impression d’avoir dix ans depuis dix ans. T’es toujours ce gamin qui joue à Batman dans la cour de récré’. Sauf que là, t’as plus ton Clark Kent. T’as plus ton t-shirt gagné dans une boîte de chocapic. Et surtout, t’as plus quatre ans. Mais tu joues encore, dans un musée, avec ton survet’ froissé et ton pull crade. Parce qu’au fond, t’as pas envie de grandir. T’as pas envie de te rendre compte qu’un jour, tu pourras plus te cacher derrière ton masque de chauve-souris. Parfois, ça t’fait peur. Peur de te rendre compte que sans ce masque, t’es juste un gars qui s’accroche à des souvenirs, des vieux t-shirts et une figurine minable trouvé dans un paquet de céréales dégueu. Billy parle de Sun. Tu hausses les épaules, tu abandonnes ton rôle un instant. “Elle a eut un empêchement.”. Ca fait mal, pas vrai ? De savoir que ta soeur, elle sera pas là pour toi toute ta vie. Elle peut pas mettre son quotidien entre parenthèses juste pour toi. Tu le sais très bien. Mais quand elle pose des post-it partout, qu’elle t’appelle tous les jours pour savoir si t’as pas oublié d’aller en cours et toutes ces conneries, petites attentions. Toi, sans Sun, t’es rien. T’es même moins que rien. T’es pire que rien. T’es juste une espèce de poisson rouge qui tourne dans son bocal à attendre qu’on te donne à manger. Parfois, ça te fout le moral en l’air, quand t’y penses. Puis t’oublies.

Les films Billy adorait ça, Billy adorait se glisser dans une salle noire, les mains dans les poches, la poussière passant devant le projecteur, elle aimait passer les doigts devant la lentille, faire des ombres chinoises, s’installer, appréhender, mettre la main à l’intérieur du pot de pop-corn, comme  Amélie cultive un goût particulier pour les tout petits plaisirs : plonger la main au plus profond d'un sac de grain briser la croûte de la crème brûlée avec la pointe de la petite cuillère et faire des ricochets sur le canal Saint-Martin. Si Oxlene avait grandi avec les super-héros il n’avait pas moins grandi avec les films, et elle le voyait dans ses yeux, quand il s’y retrouvait, quand il rejouait une scène, elle savait que ça avait un sens. Elle voulait que Oxlene voie que s’il avait du mal à communiquer en réalité, il disait énormément, rien qu’avec ce qu’il aimait. 


Mais Oxlene se perd dans ses pensées et Billy et lui avancent à travers le labyrinthe qu’est le musée, elle finit par regarder les toiles, dont une, qui soulève son coeur quelques secondes, elle ne sait pas vraiment pourquoi, elle sait juste qu’il y autre chose que les mots, que parfois ce qui est une source de tourments pour Oxlene ne devrait pas tant l’être. Mais qu’est ce qu’elle va penser, elle n’est pas non plus dans sa tête. Le rouge a la tête baissée, Billy s’approche et relève son menton, tournant la tête du garçon, de sorte à ce qu’il puisse voir le tableau au-dessus d’eux.

« A quoi ça te fait penser? »

Le cadre est en spirales, il est vieux, il est abîmé, ce sont des collections d’Etat, après tout, mais la scène est assez belle, le peintre travaille sur l’impression, les couleurs sont chaudes mais toute la nature en fond est bien plus froide, il y a deux jeunes femmes sous des ombrelles, l’une sourit l’autre lui caresse la joue, sur le drap où elles sont installées, BIlly remarque un jeu de tarot, un panier d’osier et des napperons, mais le plus remarquable, c’est le champ de bleuets, au premier plan.

Tu sais pas si t’as toujours été comme ça. Le genre de gars qui oublie les prénoms des gens. Le genre de gars qui confond les visages. Le genre de gars se souvient pas de ce qu’il faisait y’a cinq minutes. Tu sais pas. Mais ce que tu sais, c’est qu’à chaque fois que tu t’posais devant ton téléviseur, avec ce masque de batman en carton, le plaide de Maman attaché autour du cou pour faire une cape et des peluches fourrées sous ton pull pour te faire des gros muscles, tu répétais toujours les répliques cultes de ton héros préféré. Puis quand le Joker passait à l’attaque, tu courais dans toute la maison en criant “Alfred, la batmobile, tututut” et Sun qui te suivant en titubant, inondant la maison de ses rires d’enfant. Puis vous reveniez devant la télé au moment où Batman défonçait tout. Ton argent de poche passait dans tous les comics, tu cherchais toujours le jouet en premier dans les paquets de miel pops, tu t’entraînais à dessiner des chauve-souris à toutes les récréations. Batman, c’était ton héros. Encore aujourd’hui, t’arrives pas à trouver plus cool que lui. Mais quand t’y penses, Bruce, il était pas si parfait. Il était plein de doutes, pleins de soucis. Pas les soucis comme ses parents ou sa richesse. Des soucis que toi aussi tu peux comprendre. Il arrivait pas à exister. Il effaçait une partie de lui même pour en gonfler une autre. Bruce, il avait des tas de problèmes. Et Alfred avait beau lui sauver la mise, il finissait toujours dans la merde. C’est peut être ça, ton destin ? Tu sais pas. Un contact. Les doigts de Billy touche ton visage. Tu hausses un sourcil puis finalement, tes yeux rencontrent le tableau. T’as jamais vraiment compris l’art. T’as jamais cherché à savoir. Ça te dépasse, tous ces concepts que les peintres veulent faire passer. Mais Billy insiste, elle te demande à quoi ça te fait penser. Tu fais l’effort, tu te concentres, t’as du mal parce que t’as pas l’habitude de rester concentrer sur une chose à la fois à part Batman mais bon. Tu sais pas pourquoi, ça t’fait penser à Sun et la meuf qui lui a brisé le coeur. Avant. Avant qu’elle découvre que c’est une grosse conne. Qu’elle ne la quitte pour une autre. Qu’elle raconte à tout le monde des atrocités sur ta soeur. Même les jolies couleurs arrivaient pas à te faire enlever cette image. “Ça me fait penser à une pute.”. T’étais pas le genre de mec à détester les gens. T’avais pas assez d’attache pour ça. Mais cette meuf, son visage, si tu le recroises un jour, tu sais que tu pourras pas te contrôler. Tu sais que tu vas péter un câble. Et peut être même que tu deviendras violent alors que, concrètement, t’as rien d’une brute. Mais t’y peux rien. Quand ça touche à Sun, t’es plus toi-même. Tu hausses les épaules. “Ça me fait penser à quel point les humains peuvent être fragiles face à l’amour. Et ça m’saoule.”   

Le bruit de fond existait depuis le début pour Jane Osborn. Il y avait eu les messes basses de Papa à Maman, les bavardages des gouvernantes dans la cuisine ouverte, les cris des gamins Osborn dans le jardin, les filles des dortoirs de Brown occupées à mitrailler de rumeurs les nouvelles gosses qui osaient rejoindre les confréries. Le bruit de fond ne s’en allait pas, Billy apprenait à vivre avec, elle remarquait avec le temps que même Ophélia se mettait à marmonner quelques fois, à propos d’un garçon qu’elle n’aimait pas prendre dans ses bras, elle voyait Cesar fulminer, en retenant les mots à la sortie de sa bouche, le bourdonnement faisait comme des tours et puis finissait par lui manger l’intérieur de la tête.

Mais avec Oxlene, elle n’avait pas besoin de parler, les silences avaient leur place entre eux, de bons amis dirait-on, Billy s’était habituée à le voir pencher pour un autre monde que celui-ci, si elle l’exagérait elle dirait qu’Oxlene avait un amant quelque part planqué dans son crâne, mais elle est presque sûre qu’elle y trouverait un carton rempli de comics, des costumes et peut être des bombes de colorant pour cheveux. Oxlene il était pas agressif, et ça comptait pour les mots, il avait une justesse d’enfant mais c’était quand même une justesse, c’était pas son genre de dire que « c’était toutes des putes » et il avait pas non plus le regard qui se remplissait de bile, de temps en temps, c’était pas un garçon en colère, Billy elle savait ça parce que Billy était un garçon en colère.

Alors la Osborn quitte le tableau des yeux quand il se met à parler c’est comme si on avait prit une allumette pour la frotter à du métal, ça veut prendre feu, mais ça peut pas, y a une sécurité sur le pistolet du rouge, Billy l’emmène un peu plus loin, elle pèse ses mots, c’est pas son truc de parler d’amour aux gens pourtant, elle fait que ça, c’est absolument pas raisonnable, alors pour une fois, elle réfléchit avant de l’ouvrir. « Ouais. Je suis d’accord. »
Billy veut changer de sujet, parce qu’elle sait pas comment ça fonctionne pour Oxlene, si la machine peut s’arrêter une fois qu’il est lancé, lui qui arrive à se déconnecter pour à peu près n’importe quoi. « Mais on est forts aussi. Non? J'sais pas si j'avais pas douillé par amour, j'aurais pas appris à être toute seule. »

T’étais vraiment pas du genre à t’emballer pour un rien, c’est sûre. Billy et toi, vous étiez pareils et pourtant si différents. T’arrivais pas à comprendre encore comment elle fonctionnait. Mais tu savais qu’elle était pas comme sa soeur. Y’avait un truc différent, chez elle. Un truc que t’arrivais pas à cerner. Mais t’aimais bien les mystères, alors tu vivais avec, en gardant l’oeil ouvert. T’avais pas peur de lui dire des choses à elle. Parce que tu savais qu’elle aussi, elle était paumée. Peut être un peu moins que toi dans la plupart des domaines, mais elle restait paumée. Puis, tu t’disais que, quelque part, elle t’aidait à moins l’être et que toi, bah au moins, tu lui faisais oublier des trucs. T’arrivais pas à te dire que tu pouvais être bénéfique pour quelqu’un mais avec Billy, t’avais l’impression que tu pouvais l’être. Tes mots semblent la toucher, elle te répond. “J’en sais rien, Billy. J’sais pas comment ça fonctionne, l’amour.”. Toi, tu parles pas de l’amour que t’as pour ta soeur. Tu sais que cet amour te fera jamais de mal parce qu’il est pur, indestructible. Non. Toi, tu parles de l’amour avec un grand A. Le truc qu’on voit au cinéma le vendredi soir. T’as jamais eut l’impression de le vivre, de le comprendre. T’arrives pas à t’imaginer ressentir ça pour quelqu’un. Et quand ta soeur essaie de t’expliquer, ça t’dépasse. Tout ce que tu sais de l’amour, c’est que ça blesse. Ca écorche, ça laisse des traces dans le coeur des gens que tu aimes. Ca laisse des traces dans le coeur de Sun. Et cet argument, il suffit largement à t’éloigner de cette expérience. Puis, t’étais pas du genre romantique. T’avais juste pas d’avis sur la question. Ca te dérangeait pas de coucher avec des gens sans pour autant que ton coeur s’affole. Ca te dérangeait pas qu’une meuf te tienne par la main, t’embrasse, de temps en temps. Rien ne te dérangeait. T’étais ni jaloux, ni possessif, ni quoi que ce soit. Parfois, t’avais cette voix dans ta tête qui t’imaginais heureux dans les bras de l’élu.e de ton coeur. Sauf que tu faisais pas attention et tu replongeais dans un monde imaginaire où l’amour n’a pas sa place. Tu continues de marcher dans les allées. Bruce attends que tu reviennes vers lui mais t’es déjà trop loin. “J’comprends pas. Comment on sait qu’on est amoureux, d’abord ? C’est quand même un concept ultra louche, vot’ truc. Non, sérieux, c’est quoi ce bordel avec l’amour, là ?”. T’aurais pu le dire sur un ton énervé, agacé mais t’as juste l’air blasé. Blasé de voir que tout le monde est accro à cette drogue et que toi, t’arrives pas à planer comme les autres.   

La théorie de l’amant fait tout son sens, un jour on claque la porte de la maison pour rejoindre quelqu’un de mieux, de plus stable, et parfois, c’est une personne sans nom, d’ailleurs, c’est une personne qui ne dit rien du tout, peut être qu’elle fait l’amour sans sentiments, peut être qu’elle a elle-même un amant, une amante, mais quelle différence? Pourvu que ça fasse moins de bruit. Alors tous les vieux commencent à papoter en face, à propos du portrait au dessus d’eux, beaucoup trop large, beaucoup trop haut, et ils se rompront si ça se trouve le cou à force d’essayer de regarder jusqu’au plafond.

Y a des dégringolades dès que ça touche aux relations humaines chez Billy, elle arrive pas à sortir des extrêmes, jamais, elle se retrouve toujours à deux doigts d’éclater en mille morceaux, et c’est son statut d’être humain qui lui sauve la vie, alors elle voudrait bien lui dire qu’elle sait mieux que lui, mais juste hier elle se mettait une menotte au poignet et elle s’accrochait à un garçon, parce qu’il était là, et elle avait pas franchement d’autre raison.
« J’sais pas, j’trouve ça un peu débile « tomber amoureux », comment ça, tomber? Quoi tu dois te casser la gueule pour aimer quelqu’un? »
Billy lui passe devant, elle avance, les mains croisées dans le dos, elle s’arrête devant une toile qui retient pas plus son attention que ça, elle veut répondre à Oxlene, mais elle est pas mieux placée que lui pour parler. « Tu t’vois toi te poser devant quelqu’un, dire que t’es tombé amoureux? Parce que pas moi. Moi j’veux dire: ça s’est fait comme ça, fallait que je sois avec toi, parce que c’était bien, les silences c’était bien, et le reste aussi, et j’ai pas réussi, à respirer pareil depuis. J’ai l’impression, que y a plus assez d’air, dans mes poumons. Tenir à quelqu’un, l’aimer, quoique tu dises, c’est dangereux. Alors, je sais pas comment tu sais que tu tombes. Mais tu tombes. Amoureux, ça j'sais pas. »

Batman avait eut tellement de conquêtes que t’arrivais plus à suivre. Selina Kyle, Talia Al Ghul, Dinah Drake ou encore Pamela Isley et Diana Prince, de l’histoire d’amour la plus passionnelle à un simple flirt sans conséquences, Bruce Wayne était probablement l’exemple d’amoureux que tu comprenais le moins. Peut être que la pression que subissaient les justiciers les rendait plus sensible au sentiment amoureux ? Pourtant, bien que tu ne comprenais pas, à chaque fois que tes yeux parcouraient les échanges entre Selina et Bruce, les attentions qu’ils avaient l’un envers l’autre, à chaque fois, ça t’faisait quelque chose et quelque part, t’avais envie de ressentir ça pour quelqu’un. Mais t’arrivais pas. Ca v’nait pas, ça passait pas. Parfois, t’avais juste envie de ken et tu t’laissais aller par la première pouffiasse qui voulait baiser. Ouais, Ox, t’en parlais comme si y’en avait eut des tonnes. En vrai, t’avais pas serrer beaucoup de meufs dans ta vie. Si ? T’façon, tu t’en souvenais pas. Est-ce que tu te souvenais au moins de la meuf qui avait pris ta virginité de petit garçon ? A quel âge ? Dans quel contexte ? Tu t’en souvenais pas, c’est que ça devait pas être aussi ouf que ça. Ca avait probablement duré deux minutes, dans la précipitation, peut être même à l’arrière d’une bagnole ou dans les chiottes crades d’une baraque pendant une soirée, t’en savais rien. Peut être qu’elle t’avait dit des trucs sales, peut être qu’elle t’avait dit des trucs doux, peut être qu’elle t’avait rien dit, toi, t’avais sûrement laisser ton corps parler de lui même. T’étais pas très bavard d’ordinaire, alors avec une fille que tu voulais pécho, c’était pas mieux. T’allais jamais vers les meufs, tu faisais pas cet effort, mais quand elle te faisait comprendre qu’elle avait envie de toi, tu pouvais pas dire non. Et ça s’faisait naturellement, sans que tu t’poses de questions. Billy, elle parle, elle parle, encore et encore, et tu comprends pas tout mais tu sais qu’elle fait de son mieux pour bien tout t’expliquer ce qu’elle-même ne comprend pas vraiment. Alors t’écoutes, tu t’concentres et t’essaies de tout enregistrer. Puis t’essaies de t’imaginer. Imaginer ce que ça fait, ce qu’elle décrit avec des mots flous. Alors tu prends ses mains, tu la regardes dans les yeux et t’essaies d’y croire. “J’suis amoureux de toi. Depuis le début. Je sens mon coeur battre et j’arrive pas à me dire que c’est normal qu’il tape aussi fort. Je pourrais mourir pour toi, j’pourrais tout lâcher pour toi. Et même si tu veux pas de moi, je continuerais de te courir après jusqu’à ce que tu soies entièrement à moi”. Ces paroles, ça te ressemble pas. Normal, c’est pas toi qui le dit. C’est Bruce. Bruce et Selina. Tu fronces les sourcils. Tes mains se détachent des siennes. “Tu voies, Billy ? Ces mots, c’est pas crédible, dans ma bouche. Parce que j’crois pas à ces conneries.”. Tu fourres tes mains dans tes poches. Faire semblant, c’était facile mais tellement fatigant. Ça t’servait à rien, juste à faire pleurer les gonzesses et en plus, t’aimais pas le faire. Autant éloigner les gens qui en demandaient trop et garder ceux qui étaient prêt à donner.